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Minimalist ? / Maximalist !

Dans le cadre d'ARS MUSICA 2014 à Bozar, Salle M

(+ Infos : Un bus partira de Mons à 18h30 jusqu'à Bozar > INFOS : billetterie du manège.mons > +32 (0) 65 39 59 39)


Coproduction : Le manège.mons/Musiques Nouvelles – Bozar – Ars Musica



Musiques Nouvelles, direction Jean-Paul Dessy

violons : Cristina Constantinescu, Laurent Houque / altos : Karel Coninx, Antoine Combot / violoncelles : Jean-Pol Zanutel, Eugénie Defraigne / contrebasse : Thomas Fiorini / flûte :Berten D'Hollander / clarinette : Charles Michiels / trombone : Adrien Lambinet / pianos : André Ristic, Kim van den Brempt / guitare : Hughes Kolp / guitare basse : Nicolas Dechêne / percussions : Pierre Quiriny, Jean-Michel Monart

ingénieur du son : Jarek Frankowski


En 2008, la pièce 2×5, écrite pour une formation proche du groupe de rock, ouvrait une nouvelle voie dans l’œuvre de Steve Reich. Parmi ses interprètes figurait Johnny Greenwood, guitariste du groupe Radiohead. De cette rencontre a découlé, en 2012, Radio Rewrite, inspiré de deux chansons de Radiohead. Il est étonnant de constater combien, à travers cette ‘collaboration’, Reich est parvenu à élargir son horizon harmonique sans abdiquer les principes fondateurs de sa musique. À commencer par cette technique du déphasage graduel qui est à la base de la série des Counterpoint, caractérisée par un perpetuum mobile hypnotique, une vivacité rythmique que l’on retrouve dans le Cheating, Lying, Stealing de David Lang. Motorique, répétitive, cette pièce donne le sentiment d’une mécanique à la fois jouissive et effrayante, comme si la musique parvenait à s’autogénérer elle-même…


Un sentiment que l’on éprouve également à l’écoute du O Clock de Jean-Paul Dessy, méditation sur la frénésie contemporaine que son auteur décrit comme « une machine à démonter le temps » : peut-on rêver meilleure définition du minimalisme ? 


À noter que ce même soir paraîtra chez Cypres et à l'occasion de ce concert l'album O Clock de Jean-Paul Dessy >>> CLIC !


Pourquoi coupler Minimalist et Maximalist ? Le thème d'ARS MUSICA 2014 s'en amuse volontiers ; sous son titre "Mini-Maxi" se jouent le temps et la pulsation. Des figures de proue comme Steve Reich, John Adams, Phil Glass ou Gavin Bryars, mais aussi le groupe Maximalist! singulier groupe instrumental belge des années 80 (1983-1989) qui accompagna les premières créations chorégraphiques d'Anne-Teresa De Keersmaeker. Thierry De Mey, Peter Vermeersch, Eric Sleichim, Walter Hus entraînèrent dans l'aventure François Deppe, Dirk Descheenmaeker, Jean-Luc Plouvier et Jean-Paul Dessy. Pour une musique strictement acoustique, riche de contraintes et d'inventivité, au son fort, parfois brutal, très rock et systématiquement amplifié, Maximalist! se réclame d'un humour insolent et d'une inversion esthétique du minimalisme, premier et essentiel inspirateur.


PROGRAMME


Steve Reich – Piano Counterpoint (1973-2011 version piano et bande) – création belge - 12'


Jean-Paul Dessy – O Clock (2006) - 33'33"


David Lang – Cheating, Lying, Stealing (1993) - création belge - 11'


Steve Reich – Radio Rewrite (2013) – création belge - 15'


NOTES DE CONCERT


Radio Rewrite - Note de Steve Reich

pour flûte, clarinette, deux vibraphones, deux pianos, basse électrique et quatuor à cordes - 15'

Commande du London Sinfonietta - création le 5 mars 2013.

Au fil des siècles, les compositeurs ont utilisé la musique préexistante (folk ou classique) pour imaginer leurs propres pièces. C'était particulièrement remarquable du début du XVe à la fin du XVIIe où le standard "L'homme armé" fut utilisé comme point de départ de messes par Dufay, Ockeghem, Josquin des Prés ou Palestrina parmi d'autres. "L'homme armé" était une chanson populaire séculière, cependant écrire une messe revenait à l'époque à écrire une symphonie pendant la période classique ou romantique. Beaucoup plus tard au XIXe, Brahms écrivit "Variations sur un thème de Haydn" et au XXe siècle, Stravinsky retravaille la musique de Pergolese pour sa propre "Pulcinella". "Radio Rewrite", après "Proverb" (Pérotin) et "Finishing the hat - 2 pianos" (Sondheim), est ma modeste contribution au genre.

Maintenant, au début du XXe, nous vivons un âge de remixes où les musiciens prennent des morceaux audio d'autres musiques et les remixent pour en faire un audio de leur cru. Etant un compositeur de musique écrite, j'ai choisi de faire référence à deux chansons du groupe Radiohead pour un ensemble de musiciens jouant des instruments non rock. Les deux chansos étaient "Everything in its right place" et "Jigsaw falling into place".

En voici l'histoire : 

En septembre 2010, j'étais à Cracovie pour un festival de musique. Un des artistes était Johnny Greenwood de Radiohead qui avait préparé tous les "backing tracks" pour ma pièce "Electric Counterpoint" et qui jouait de la guitare électrique pendant ces tracks en concert. Ce fut une grande performance, et nous avons commencé à parler; J'ai appris qu'il était altiste de formation et qu'il composait activement, ce qui était extrêmement intéressant pour son groupe de rock si important et innovateur. Même le directeur du festival, Filip Berkowitz, me conseilla d'écouter Radiohead ! Quand je rentrais chez moi, je me mis à écouter leur musique immédiatement et les deux chansons précitées me frappèrent.

Il n'était pas dans mon intention d'écrire des variations sur ces chansons, mais plutôt de dessiner sur leurs harmonies et parfois leurs fragments mélodiques et de les travailler dans ma propre pièce. C'est ce que j'ai fait. En fait, si vous écoutez les chansons originales, il faut admettre que vous les entendez parfois... ou pas.

"Radio Rewrite" comprend cinq mouvements joués sans aucune pause. Les premier, troisième et cinquième sont rapides et basés sur "Jigsaw" ; les deuxième et quatrième sont lents et basés sur "Everything". La pièce a été écrite en août 2012.


Piano Counterpoint - Note de Steve Reich

Arrangement de "Six pianos" pour piano et bande par Vincent Corver (1973, arr. 2011) - 12'

Commande du London Sinfonietta - création le 5 mars 2013.

Quatre des six parties pour piano ont été préenregistrées et les deux dernières ont été combinées en une seule plus virtuose et jouée en live par un pianiste soliste. Il a donc fallu augmenter certains passage d'une octave pour en décupler l'intensité et le rayonnement. L'amplification du piano solo aux côtés de la bande pré-enregistrée, ajoute à la pièce une incroyable électricité.


Cheating, Lying, Stealing - Note de David Lang

pour clarinette basse, violoncelle, piano et percussions - 1993 (révision 1995) - 11'

Commande Meet the Composer/Reader's Digest - Création 1993 Pittsburg New Music Ensemble

Il y a quelques années, j'ai commencé à réfléchir à la façon dont les compositeurs classiques essayaient souvent d'exprimer quelque chose à propos d'eux, avec fierté ou complaisance, en écrivant une nouvelle pièce. "Voici une mélodie jaillissante qui montre la puissance de mes émotions." Ou "écoutez cette pièce extrêmement abstraite et voyez comme je suis complexe, comme mon cerveau est énorme !" "Je suis plus noble, plus sensible, et j'en suis si heureux." Le compositeur ou la compositrice est vraiment persuadé(e) d'être un modèle en ces domaines. C'est intéressant, mais ce n'est pas très humble. Alors, ai-je pensé, que se passerait-il si les compositeurs basaient leur pièce sur ce qui ne va pas du tout chez eux ? Par exemple : "voici une pièce qui montre combien je suis misérable. Ou écoutez quel menteur et quel tricheur je suis." J'avais envie d'écrire une pièce qui discrédite. C'est une frontière difficile à traverser. Vous devez vous battre contre vos réflexes. On ne vous apprend pas à chercher dans la musique les travers les plus sales. Vous n'êtes pas encouragés à la bassesse, la maladresse ou la sournoiserie. Dans "cheating, lying, stealing", j'essaie de regarder avec humour notre côté obscur. On fanfaronne mais on n'est pas très fiable. En fait, l'instruction à suivre pour jouer cette pièce est "funk menaçant".


O CLOCK -  Note de Jean-Paul Dessy

Pour deux violons, deux altos, deux violoncelles, contrebasse, guitare électrique, trombone, percussion, clarinette, piano et électronique - 33'33"

Commissionné par Heiner Goebbels. Création le 14 janvier 2006 à l’Opéra de Francfort par l’Ensemble Modern.

Le monde extérieur vit sous l’emprise du temps horloger, tic-tac implacable, Chronos vorace qui ne cesse d’engloutir nos instants fugitifs à jamais révolus. Ce temps du va-et-vient parfois nous grise, souvent nous blesse, toujours nous asservit.


Mais notre monde intérieur connaît aussi un temps sans temps, présent permanent, Orphée qui du temps suspend le vol, temps de l’instant infini. Ce temps d’immensité nous délie, nous grandit, nous unit.


Entre ces temps, nos vies tempêtent ou temporisent.


O CLOCK, horloge d’intériorité, avance et retarde, tinte et s’éteint, oscille entre le glas et les carillons, entre les sons pulsés et les sonorités étales, entre le cliquetis des mécaniques et la stridulation des cigales, entre Dionysos en jubilation et Apollon en contemplation.


Le O de O CLOCK est tout autant la lettre que le chiffre: o’clock à l’heure ou zero clock sans heure.


O CLOCK est une machine à démonter le temps.


BIOGRAPHIES


JEAN-PAUL DESSY

Compositeur, chef d'orchestre et violoncelliste,Jean-Paul Dessyest également titulaire d'une maîtrise en philosophie et lettres.Il a dirigé près de deux cent créations mondiales et enregistré plus de cinquante CD de musique classique contemporaine, recevant de multiples récompenses (Le Choc duMonde de la Musiqueet deClassica, Diapason d’or, etc.). Compositeur de musique symphonique, musique de chambre et musique électronique, il crée celle de l'opéraKilda, l'île des hommes-oiseaux,qu'il dirige lors de l'ouverture du Festival d'Edimbourg en 2009. Sa pièce L'ombre du sona reçu le prix Paul Gilson des Radios Publiques de Langue Française. Auteur de nombreuses musiques de scène, il écrit pourJacques Lasalle,Denis Marleau,Anne-Laure Liégeois,David Géry,Lorent WansonouFrédéric Dussenne,pour des chorégraphes tels queCarolyn Carlson, Frédéric FlamandouNicole Mossoux,pour les films et les défilés du stylisteHussein Chalayanou encore pour lesLevers de soleildeBartabas. Le Chant du Monde/Harmonia Mundi a publié deux CD consacrés à ses compositions :The Present's presentsetProphètespour violoncelle seul, dont il est également l'interprète. Son univers s'arrime tant à son parcours classique qu'aux chemins de traverse qu'il a beaucoup arpentés (rock et électro). Jean-Paul Dessy inscrit sa recherche musicale dans le champ du sacré : le concert comme liturgie, la pratique instrumentale comme voie de méditation, la composition comme lieu de prophétie, le son comme révélation.


DAVID LANG

David Langest né à Los Angeles le 8 janvier 1957. Diplômé des Universités deStanford, de l'Iowa et de Yale, il a eu pour professeursJacob Druckman,Hans Werner HenzeetMartin Bresnick. Passionné, prolifique et complexe, il déborde d'une créativité intense et débridée. Profondément lié à la tradition classique, il résiste aux étiquettes et décloisonne la musique en créant constamment de nouvelles formes. Chacune de ses pièces, totalement originale, manifeste avec acuité la même clarté formelle, qu'il s'agisse d'un opéra, de musiques de chambre, pour grand orchestre, oupour instrumentssolos. Ethérées, hypnotiques, effrénées, inclassables et puissamment émouvantes, ses œuvres exigent de leurs interprètes autant de subtilité que de virtuosité. Il a participé notamment à l'orchestration duKronos Quartetpour la musique du filmRequiem for a dream deDarren Aronofsky. Pour la même formation, il a composé en 1999 l'opéraThe Difficulty of crossing a field, d'après une nouvelle d'Ambrose Bierce. En 2008, il reçoit le Prix Pulitzer pourLittle match girl passion (La Passion de la petite fille aux allumettes) inspirée du conte deHans Christian Andersenet de laPassion selon Saint MatthieudeJean-Sébastien Bach,une commande de Carnegie Hall pour l'ensemble vocal Theater of VoicesdePaul Hillier.Aujourd’hui l’un des musiciens américains les plus joués, il a été élu en 2013 Compositeur de l’année par l’association Musical America. Il est compositeur en résidence à l’American Conservatory Theater de San Francisco.


STEVE REICH

Né le 3 octobre 1936 à New York, Steve Reich partage son enfance entre New York et la Californie. Il étudie le piano puis se tourne vers la percussion après avoir entendu le batteur Kenny Clarke accompagner Miles Davis. Il entre à la Cornell University en 1953 et obtient une licence de philosophie en 1957. Reich approfondit aussi sa connaissance de l'histoire de la musique (de Bach au XXesiècle) en assistant aux cours de William Austin. De retour à New York, il étudie la composition avec le jazzman Hall Overton, puis avec William Bergsma et Vincent Persichetti à la Juilliard School (1958-1961) où il fait la connaissance de Philip Glass. Il retourne en Californie au Mills College où il étudie la composition avec Darius Milhaud et Luciano Berio, rejette le sérialisme mais s'imprègne du jazz modal de Coltrane, et obtient, en 1963, son Master of Art. En 1964, il participe à la création de la pièce répétitive In C de Terry Riley qui influence fortement son approche de la musique répétitive. Il fréquente le San Francisco Tape Music Center et compose ses premières œuvres pour bandes magnétiques dont It's Gonna Rain (1965) basé sur le principe du déphasage graduel qu'il adaptera ensuite aux pièces instrumentales. De retour à New York en 1966, il fonde son propre ensemble, le Steve Reich and Musicians, qui va connaître un succès mondial. Il découvre la musique indonésienne à travers la lecture deMusic in Balide Colin McPhee. Reich fréquente alors les artistes plasticiens de sa génération tels que Sol LeWitt et Robert Smithson et se produit à la Park Place Gallery en 1966 et 1967. Il incarne alors la branche musicale du minimal art dont la pièce emblématiquePendulum Music, à mi-chemin entre sculpture sonore et performance, sera créée en 1968 par lui-même et le peintre William Wylie. En 1969, Steve Reich et Philip Glass travaillent quelque temps avec Moondog qu'ils proclament alors « fondateur du minimalisme ». Pendant l'été de 1970, Reich étudie les percussions africaines à l'Institut des Études africaines de l'Université du Ghana à Accra. Enrichi de cette expérience, il compose Drumming (1971-1972), pour diverses percussions et voix, stade ultime de raffinement de la technique de déphasage et première apparition de la substitution des battements aux silences. Entre 1970 et 1973, il collabore étroitement avec la danseuse et chorégraphe Laura Dean. En 1973 et 1974, il travaille la technique des gamelans balinais Semar Pegulingan et Gambang à l'American Society for Eastern Arts à Seattle et à Berkeley, Californie. De cette période datent Six Pianos (1973) puis Music for Eighteen Musicians (1976). En 1974, il rencontre sa future épouse Beryl Korot grâce à qui il redécouvre le judaïsme et apprend l'hébreu. De 1976 à 1977, il étudie à New York et à Jérusalem les formes traditionnelles de cantillation des textes sacrés hébraïques don tTehillim (1981) sera l'écho. À la fin des années quatre-vingt, Reich emploie à nouveau les bandes magnétiques notamment dans Different Trains, pour quatuor et bande, évocation des allers-retours en train de son enfance entre New York et Los Angeles et « d'autres trains » roulant en Europe vers les camps de la mort. Le nouveau mode de composition utilise les paroles de textes enregistrés pour générer le matériau instrumental. Sa musique s'est progressivement éloignée du minimalisme. City Life (1995), pour instruments et samplers, marque une évolution dans l'utilisation technologique : deux claviers jouent en direct des fragments de paroles et des bruits urbains échantillonnés. Son inclination pour la musique ancienne (Pérotin) lui inspire Proverb (1995). Avec The Cave (1989-1993), conçu autour d'Abraham, père des trois religions monothéistes, et composé pour un ensemble instrumental accompagnant la projection d'une vidéo réalisée par Beryl Korot, Reich se lance dans la création multimédia. En 1994, il devient membre de l'American Academy of Arts. De 1998 à 2002, il compose Three Tales, opéra vidéo traitant de la domination technologique du XXesiècle à travers trois épisodes : le crash du Zeppelin en 1937 (Hindenburg), les essais nucléaires américains dans le Pacifique de 1946 à 1952 (Bikini) et la brebis clone conçue en 1997 (Dolly). En 2006, il reçoit le prix Praemium Imperial (Japon), en 2007 le Polar Music Prize (Suède) et en 2009 le Pulitzer Prize de la musique pour Double Sextet.



Représentations passées

18/11/2014
ARS MUSICA - Bozar - 1000 Bruxelles

Photos : Isabelle Françaix, © Festival Ars Musica 2014, © Schuiten & Durieux, Jeffrey Herman. Télécharger les photos.